
L’ÉDUCATION, C’EST LA FAMILLE QUI LA DONNE ; L’INSTRUCTION, C’EST L’ÉTAT QUI LA DOIT
On entend souvent dire que le problème d’Haïti, des haïtiens, est un problème d’éducation. Tranchons une fois pour toutes et finissons-en avec cette assertion qui laisserait croire que le peuple haïtien serait différent des autres peuples de la terre.
Tout d’abord il faut clarifier la question à savoir, de quelle éducation parle t-on : éducation des enfants, des adultes, des sous scolarisés, des scolarisés, des non diplômés, des diplômés, des fonctionnaires, des autorités, des juges, des diplomates, des ministres, des présidents, etc. puisque, de bas en haut de gauche à droite, le cauchemar haïtien est une affaire de société où chacun est concerné et se trouve, malgré tous les efforts concédés, responsable en tout ou en partie.
De quel côté se trouve le tort de l’incapacité où le mal en puissance ? du côté des analphabètes ou des instruits ? Qui administre le pouvoir, le peuple ou les fonctionnaires de l’État ? Donc, si la réponse est en faveur du peuple qui d’habitude, dans tous les pays du monde, ne fait que suivre les instructions données, ce n’est pas à lui que l’on s’adresse quand on parle d’éducation. Car tous les peuples se ressemblent. La différence entre eux, c’est le sens de la responsabilité inné ou acquis que devraient posséder les fonctionnaires de l’État, qu’ils soient élus ou nommés.
Les brebis obéissent aux bons soins du berger par instinct naturel de survie, pourtant elles n’ont jamais été à l’école. Et le berger de son côté, sachant qu’en retour sa vie dépend de la bonne santé de ses brebis en prend soin et leur procure le maximum de bienfaits afin qu’elles soient en bonne forme physique. Comme çà tout le monde est heureux et se la coule bien. Mais quand le berger est irresponsable et laisse ses brebis paître dans le voisinage, au frais des voisins, c’est la pagaille, le désordre et la rengaine, jusqu’à ce qu’un beau jour le voisin fatigué de subir l’assaut des brebis négligées prenne sa « manchette » et commence à couper des têtes. Le troupeau se désagrège, le berger est appauvri et la cité en pâtit.
Le niveau d’éducation n’a aucun rapport avec le comportement social d’un individu. Celui-ci en tant que sujet social se comporte selon ses besoins, surtout quand ceux-ci sont la base de l’existence. Est-ce pourquoi l’État dans les sociétés organisées s’arrange pour que ces besoins soient satisfaits. Ce qui se passe en Haïti ou ailleurs dans les sociétés où ces besoins ne sont pas satisfaits, c’est le résultat du vol, de la méchanceté, de la corruption, du rapport fratricide, de l’égoïsme, tout ceci alimenté par une éducation trop poussée vers le gain ,des têtes bien pleines mais pas bien faites.
Aujourd’hui, dans ces société organisées il y a de graves problèmes d’éducation, parce que les parents, justement, n’ont plus le monopole de l’éducation. L’État, incapable de la procurer, puisque c’est une mission qui relève de la famille, les enfants sont livrés à eux-mêmes et tout le monde voit ce que cela donne: des parents frustrés et des enfants trop tôt devenus adultes. Résultat, personne ne veut plus enfanter, la famille est réduite à sa plus simple expression, et c’est la panique sur ce que sera demain.
Enfin, le problème d’Haïti et de tous les peuples en difficulté, c’est un problème d’État dont les dirigeants sont directement responsables. Ils sont tous éduqués et capables de vous sortir toutes les logiques grammaticales, philosophiques et intellectuelles mais incapables de faire un calcul mathématique qui ne soit argent sonnant et monnaie courante. Est-ce dû à la forme, dans les conditions connues de tous, lorsque faute d’électricité une douzaine d’écoliers ou d’étudiants se réunissaient sous un lampadaire mal foutu, et apprenaient leurs leçons par cœur? ou est-ce dû au système scolaire qui avait adopté le fouet comme outil d’orientation, à l’image de ce que nous avait laissé le colon ? Une chose est certaine, nos leaders ont tous de très beaux discours, le « par cœur », mais aucune formation logique réelle pour atteindre de bons résultats. Ceux qui ont reçu de la bonne éducation, familiale, savent bien que « qui sème le vent récolte la tempête ». Une logique tout à fait mathématique.
A notre avis, mathématiquement analysé, le problème haïtien est plutôt d’un ordre systémique dans lequel sont réunis tous les aspects du racisme, de l’anarchie, de la tyrannie et du mal en puissance. Les conséquences de cette confrérie politique sont lourdes et alimentent en chacun de nous le sentiment d’être le peuple le plus ignare que la terre ait engendré. Là encore ce sont surtout les prétentieux, les colonisés, les acculturés qui le pensent ainsi. L’arrière pays regorge de nobles paysans qui ont le savoir-vivre et donnent le ton quand il s’agit du vivre ensemble. Pourtant, eux non plus ils ne sont pas éduqués. Malheureusement ils ont été si sauvagement exploités, qu’aujourd’hui ils se retrouvent, peut-être, aussi, parmi ces sauvages et dégoûtés que nous sommes tous devenus.
Heureusement, vous et moi nous avons eu la chance de recevoir l’éducation de nos parents et l’instruction par l’État dans des pays où il existe, comme le dit si bien Victor Hugo ; par rapport à ceux qui aujourd’hui sont orphelins de parents et d’État, en Haïti.
Dire que le problème de l’haïtien est un problème d’éducation est une insulte à l’intelligence des uns et des autres qui n’ont rien à voir avec le système politique établi en Haïti.
L’homme étant le produit de son environnement, quand l’environnement est médiocre, il l’est lui aussi ; quand l’environnement est responsable, il le devient par la force des choses. Tel est le cas des nombreuses communautés haïtiennes établies partout dans la Diaspora. Sont-elles éduquées et instruites ? pas nécessairement. Mais elles se comportent comme telles. Car c’est l’une des communautés qui ne causent presqu’aucun problème dans les pays d’accueil.
Pour finir, le problème d’éducation doit être posé pour soi-même et non pour les autres. Car nous non plus nous ne sommes pas meilleurs qu’eux. Chacun a quelque chose à se reprocher à l’égard des autres, de quoi se plaint-on alors lorsque çà ne va pas, lorsque les autres ne nous trouvent pas trop catholique et nous bottent le cul ?
Merci.
Je Plaide
09 Janvier 2022
Mike Joseph